La droite et la gauche, un couple fondateur de l’histoire de France

Alors que l’UMP change de nom pour devenir Les Républicains, qu’au PS des motions ont été proposées puis votées proposant des définitions différentes de ce qu’est le Parti Socialiste et donc la gauche nous avons décidé de vous proposer un retour historique sur le couple droite-gauche si caractéristique de la vie politique, culturelle et sociale française.

Spécifiquement français, la droite et la gauche sont des données particulières de notre histoire nationale. C’est un couple classique, typique, à tel point qu’il en est certainement devenu également simplificateur : il faudrait plutôt parler des gauches, des droites, mais aussi des centres. L’ouvrage célèbre de René Rémond, La droite en France, publié en 1954 a plusieurs fois été réédité pour devenir dans les années 1980, Les droites en France, symbole d’une prise de conscience plus forte de la diversité des courants politiques qui animent la France depuis la fin du XVIIIe siècle. Dans ce livre qui a fait grand bruit et qui est toujours une référence en histoire politique, René Rémond définissait trois grandes droites : les légitimistes, les bonapartistes, les libéraux. L’auteur voit dans ces trois courants, les racines des droites que l’on rencontre encore aujourd’hui en France.

  • Les légitimistes, profondément contre-révolutionnaires (nous parlons ici de la Révolution de 1789), se poursuivent dans la France de Vichy puis le Front National.
  • Les bonapartistes, désirent un pouvoir fort, se méfient des partis et font du recours au peuple un mode de gouvernement au travers du référendum. À ce titre, René Rémond les rapproche du gaullisme.
  • Les libéraux incarnés d’abord par les Orléanistes et que l’on retrouve au XXe siècle avec Valéry Giscard d’Estaing. Acceptant le drapeau tricolore et faisant confiance au parlement, ils accèdent au pouvoir en 1830, avec le roi Louis-Philippe Ie, dernier roi de Français après les Trois Glorieuses magnifiquement mises en scène par Eugène Delacroix…

delacroix Eugène Delacroix – La liberté guidant le peuple

Pour la gauche, ou les gauches, les historiens ont travaillé de manière plus dispersée, multipliant les ouvrages sur le socialisme, le communisme, le radicalisme, l’anarchie ou encore le mouvement ouvrier et réalisant d’abord une histoire des familles politiques qui composent les gauches avant d’élaborer des synthèses. Jean-Jacques Becker et Gilles Candar qui ont dirigé une Histoire des gauches en France en deux tomes passionnants, expliquent cette approche par une différence fondamentale entre la gauche et la droite : le conservatisme de la droite en ferait un phénomène stable et donc plus facile à étudier tandis que la séparation en fractions est une attitude que l’on retrouve plus à gauche qu’à droite où les divisions touchent les personnes plus que les contenus.

Comment naît cet antagonisme entre la droite et la gauche ? Quel est l’évènement fondateur ? Indéniablement et sans contestation, c’est la Révolution Française de 1789. Il est encore difficile, voire anachronique, de parler de partis de gauche et de droite à la fin du XVIIIe siècle, mais c’est autour de l’héritage de la Révolution que se cristallise ce couple. Le clivage touche d’abord la figure du roi et de sa place comme chef de la nation, du droit de véto des Français, il se déplace ensuite autour du rôle du peuple dans la Révolution et dans la République. Tout le long du XIXe siècle, les débats de la Révolution sont réactivées, il y a ceux qui sont pour, ceux qui sont contre, ceux qui pensent qu’elle a été confisquée par la bourgeoisie, ceux qui pensent qu’elle n’est pas terminée, et toutes les nuances possibles dans chacun de ces camps ! Évidemment, les positionnements évoluent et le couple droite-gauche n’est pas immuable, au contraire il existe une forte perméabilité entre les droites et les gauches : les Républicains de 1789, ne sont pas les mêmes un siècle plus tard. Ainsi, de nombreux hommes de droite défendent des idées perçues comme de gauche une fois la République fermement établie en France, jusqu’à en faire aujourd’hui le fondement même du plus grand parti de droite du pays.